Les terres rares, on en parle de plus en plus. Il ne s’agit pas d’un lopin de terre paradisiaque, mais des minerais très prisés dans le secteur industriel et high-tech. De nombreuses sociétés proposent d’investir dans ce qui semblerait être une nouvelle manne pour les investisseurs, mais le placement est-il aussi prometteur qu’on pourrait le croire ?
Que sont les terres rares ?
Les terres rares sont un groupe de métaux aux propriétés similaires comprenant :
– le scandium 21Sc
– l’yttrium 39Y
Et les quinze lanthanides :
– Le lanthane
– Le cérium
– le praséodyme
– le néodyme
– le prométhium
– le samarium
– l’europium
– le gadolinium
– le terbium
– le dysprosium
– le holmium
– l’erbium
– le thulium
– l’ytterbium
– et le lutécium.
Sous leur forme élémentaire, les terres rares sont des métaux assez tendres, malléables et ductiles. Ils sont chimiquement réactifs, surtout à des températures élevées ou lorsqu’ils sont finement divisés.
Contrairement à ce que leur nom laisse penser, les terres rares ne sont pas des métaux difficiles à trouver, ils sont même relativement répandus (à part le prométhium). Par exemple, on trouve du cérium en même quantité sur Terre que le cuivre. Mais ils sont en revanche assez difficiles à détecter et surtout à isoler chimiquement.
Même si leurs applications industrielles sont nombreuses, l’or, l’argent ou encore le platine entrent quant à eux dans la catégorie des métaux précieux.
Des enjeux technologiques, économiques et stratégiques
Les terres rares sont purifiées pour la première fois purifiées à un niveau industriel dans les années 1940, avec le premier projet de bombe atomique (le projet Manhattan).
Il faut attendre les années 1970 pour que l’une d’elles, l’yttrium, trouve une application de masse dans la fabrication de luminophores des tubes cathodiques utilisés dans la télévision couleur. Du point de vue de l’économie mondiale, les terres rares font désormais partie de ce que l’on appelle les métaux stratégiques.
La chaîne Arte avait consacré un reportage sur les terres rares en janvier dernier, « Terres rares, La high-tech à quel prix ? ». Il est question de l’enjeu stratégique que représentent les terres rares, présentes dans l’industrie high-tech et automobile : « Durant des siècles, néodyme, yttrium ou lanthane paraissaient sans valeur. Aujourd’hui, ces métaux appelés terres rares sont indispensables à la fabrication des smartphones, éoliennes et autres véhicules hybrides », une industrie en plein essor.
Il s’agit de métaux indispensables pour notre avenir et une matière première plus précieuse que l’or ou le pétrole. Les enjeux des terres rares sont économiques car elles représentent un marché juteux, mais également stratégiques. L’approvisionnement en terres rares pose un véritable problème dans l’Europe industrielle car elles ne sont pas substituables et c’est la Chine qui a la mainmise sur la quasi-totalité de l’extraction de ces minerais. Ce qui met tout l’Occident en situation de dépendance vis-à-vis de la Chine.
Le néodyme et le samarium entrent par exemple dans la fabrication d’aimants permanents utilisés dans l’imagerie médicale ou encore l’aéronautique. En cas de conflit avec la Chine, de quelconques problèmes d’approvisionnement, la production d’objets dont les terres rares entrent dans la fabrication devrait tout simplement s’arrêter.
L’approvisionnement en terres rares, une priorité pour le gouvernement
L’approvisionnement de ces minerais est devenu une des priorités du gouvernement.
Le ministère a créé dans cette optique le COMES, un « Comité pour les métaux stratégiques » dont la principale mission est « d’assister le ministre chargé des matières premières dans l’élaboration et la mise en œuvre de la politique de gestion des métaux stratégiques, en vue de renforcer la sécurité d’approvisionnement nécessaire à la compétitivité durable de l’économie française ».
La Direction Générale de la compétitivité de l’industrie et des services a consacré une page aux métaux stratégiques dont font partie les terres rares sur son site web et mis à la disposition des entreprises concernées des outils permettant de piloter ses approvisionnements.
Une extraction coûteuse et polluante
Si les terres rares constituent une véritable manne pour l’industrie de la haute technologie, elle comporte des zones d’ombre, en dehors des problématiques d’approvisionnement et de monopole de la Chine qui répond à la quasi-totalité des besoins mondiaux.
La méthode qui consiste à passer du minéral brut à un métal épuré est très polluante et consomme beaucoup d’énergie. Certains processus de séparation dégagent même des déchets radioactifs. « Un comble, lorsqu’on sait que la plupart des énergies renouvelables ont recours aux terres rares… » (éoliennes et panneaux photovoltaïques), précise le résumé du reportage sur la page d’Arte.
Pour pallier à la situation de dépendance vis-à-vis de la Chine et trouver des procédés d’extraction plus écologiques, des recherches sont en cours sur l’extraction de terres rares en haute-mer, mais le procédé est encore neuf et coûteux.
Pourquoi les terres rares sont un placement risqué ?
Malgré l’intérêt et les nombreux enjeux qu’elles représentent, les terres rares sont un investissement risqué. Déjà, elles ne sont disponibles que sous forme d’investissement papier. Les risques d’un tel investissement sont donc les mêmes que pour n’importe quelle action : ultra volatilité, risques liés à l’entreprise (faillite), aux facteurs géopolitiques… On peut même redouter une manipulation des cours, comme avec les ETfs d’or. Si les perspectives de gain sont assez certaines dans les années à venir, la non maîtrise de ce marché encore récent invite à la prudence. L’intérêt de placer du capital autrement que pour de la spéculation dans ces métaux est donc peu évident. Un placement dans les terres rares ne peut en aucun cas pas servir de protection patrimoniale.
Quant au fait d’en détenir physiquement, si tant est que vous ayez la possibilité de vous en procurer, aucun intérêt ! En cas de crise, le praséodyme ou le terbium ne sont pas reconnus comme des monnaies métal !