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Serait-ce la nouvelle recette pour lutter contre le chômage ? Après avoir échoué à transformer les chômeurs en chefs d’entreprise grâce au statut de l’auto-entreprise, voilà qu’on tente aujourd’hui de pousser les salariés eux-mêmes vers l’indépendance, sans doute pour libérer de la place dans les entreprises afin d’y faire entrer les demandeurs d’emploi.

Le raccourci est rapide, j’en conviens, et cynique aussi. Mais force est de constater que la gauche française n’est plus ce qu’elle était. Entre l’allègement des procédures de rupture du contrat de travail, l’assouplissement des règles de création d’entreprise (y compris dans certaines branches professionnelles règlementées) et le projet de tripler les seuils du statut d’autoentrepreneur, François Hollande semble définitivement vouloir favoriser le libéralisme économique au détriment de la sécurité des travailleurs. Oui parce que, pour ceux à qui cela aurait échappé, un entrepreneur est beaucoup moins bien protégé qu’un salarié. Lorsqu’on est président de la République ET socialiste, c’est osé.

Et pourtant, derrière les convictions réaffirmées de François Hollande le 18 janvier dernier dans son discours devant le Conseil économique, social et environnemental, ce sont bien des idées résolument en faveur des entreprises qui se sont manifestées : simplification de la rupture du contrat de travail, on l’a dit, mais aussi nouvelles libertés accordées aux entreprises sur le temps de travail ainsi que sur le paiement des heures supplémentaires, plafonnement des indemnités accordées aux salariés par les conseils des prudhommes, pérennisation des crédits d’impôts, suppression des cotisations sociales sur les bas salaires pendant deux ans, etc. À croire que le pays a changé de majorité en même temps que de millésime sur le calendrier !

Bien sûr, on peut également voir toutes ces mesures sous l’angle d’une plus grande incitation à embaucher, ce qui serait au final favorable aux travailleurs, ou en tout cas à ceux qui souhaiteraient le (re)devenir. Mais ce qui ressort surtout de son discours c’est que, désormais, les salariés comme les chômeurs doivent avoir davantage vocation à chercher des clients plutôt que des patrons.

En effet, d’autres mesures sèment le doute quant aux motivations du chef de l’État, lequel va presque trop loin dans le soutien aux entreprises. D’abord, il y a sa volonté affirmée de faciliter le licenciement alors que, dans le même temps, on reparle de rétablir la dégressivité des indemnités de chômage. Un peu comme si on aidait les employeurs à pousser les salariés dehors tout en expliquant à ces derniers qu’ils vont devoir trouver rapidement une solution pour gagner leur vie. Certes, les incitations à l’embauche sont là pour donner l’illusion d’un contrepoids mais ces aides ne concernent que les bas salaires et on peut parfaitement imaginer que les entreprises vont vouloir en priorité se débarrasser de leurs employés les plus « coûteux ». Sauf à accepter d’être ré-embauchés ailleurs à moindre coût (en gros, au SMIC), ces ex-salariés n’auront d’autre choix que de créer leur propre entreprise.

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Et ça tombe bien car les autres mesures annoncées par François Hollande visent justement à « lever les freins à l’entrepreneuriat« , notamment en supprimant certaines qualifications qui peuvent parfois constituer des barrières à la création d’entreprise, ou encore en relevant les plafonds de l’auto-entreprise, rendant alors ce statut bien plus séduisant pour des cadres reconvertis ou encore des demandeurs d’emploi un peu plus exigeants en termes de revenus. Car n’oublions pas que, depuis sa création en 2009, à défaut d’opérer des réformes réellement efficaces du marché du travail telles que préconisées par l’OCDE, les gouvernements successifs ont toujours considéré l’auto-entreprise comme une solution au chômage.

Bref, il semble qu’on s’achemine doucement vers une société dans laquelle le salariat ne sera plus le statut majoritaire mais plutôt une sorte de période de transition, voire d’apprentissage, ou pire, une voie de garage pour ceux qui n’auront pas su créer leur propre activité.

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Anthony Alberti
Entrepreneur depuis vingt ans dans le domaine de la communication et l'information stratégique, il a été amené à travailler plusieurs fois en partenariat avec des banques et des assurances, dont la principale matière d'œuvre était constituée de l'argent des épargnants. Peu complaisant à l'égard de leurs pratiques dont il a entrevu les coulisses, il délivre aujourd'hui régulièrement son analyse sans concession (et souvent piquante) non seulement sur les agissements des professionnels de la finance, mais aussi de tous ceux qui, de près ou de loin, se font les auteurs ou les complices des manipulations qui spolient chaque jour un peu plus les honnêtes citoyens.

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