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Septième volet de notre dossier « Or vs Bitcoin. » Sur les réseaux sociaux, l’opposition entre partisans des cryptoactifs et tenants de l’or prend parfois la forme d’un conflit de générations. Pour certains, la « relique barbare » aurait même vocation à être remplacée par l’or numérique qu’est le bitcoin. Que faut-il en penser ?

L’or, un truc de boomer nostalgique ?

La performance financière du bitcoin est telle qu’elle éclipse totalement l’or aux yeux de certains. Ces deux classes d’actifs ayant des similitudes, d’aucun en concluent qu’il est grand temps de délaisser le métal jaune au profit du tout numérique, comme on me l’a fait remarquer en commentaire de la vidéo que j’ai consacrée au marché de l’or.

Venant tout juste de fêter mes 37 ans, j’en déduis que j’appartiens à la catégorie des « nostalgiques » – en tout cas pour quelques années encore. Comme cela me chagrinerait d’avoir sombré dans cet écueil, je vous propose un examen de conscience sous la forme de cette série de billets.

Pour ne pas changer mes habitudes, je vous dirai en conclusion (la semaine prochaine) quelle place occupent chacun de ces deux actifs dans mon portefeuille financier. J’espère que vous n’y verrez pas là un accès de nombrilisme. Je le ferai car il est fort plaisant de noircir des kilomètres de pages sur des questions ayant trait aux finances personnelles, il me semble que c’est encore mieux d’être transparent en montrant que l’on adopte une attitude conforme à son analyse.

Quoi qu’il en soit, on ne compte plus les articles qui titrent sur ce sujet sous l’angle du choc des générations.

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Qu’est-ce qui pourrait mieux illustrer ce point de vue que cet échange entre le goldbug Peter Schiff (58 ans), et son fils Spencer (« ancien goldbug » de 18 ans, comme indiqué sur sa biographie Twitter).

16 février 2021 : Peter Schiff : « Maintenant que le bitcoin a atteint 50 000 dollars, je dois admettre qu’une hausse à 100 000 dollars n’est pas à exclure. Cependant, une baisse jusqu’à zéro ne peut pas être exclue non plus. Si une hausse temporaire jusqu’à 100 000 dollars est possible, une baisse permanente jusqu’à zéro est inévitable. Si vous ne voulez pas jouer, achetez de l’or. » / Spencer Schiff : « Futur tweet : « Maintenant que le bitcoin a atteint 500 000 dollars, je dois admettre qu’une remontée à 1 000 000 de dollars n’est pas à exclure. Cependant… » »

Il faut dire que les déclarations de Peter Schiff au sujet du bitcoin ne contribuent guère à redorer le blason des partisans de l’or.

1er mars 2021 : « Félicitations à ceux qui ont acheté des bitcoins très tôt, qui ont fait grimper leur prix et qui ont vendu avec le battage médiatique. Vous avez réussi à convaincre Wall Street d’adhérer à cette folie. Quand j’ai appris l’existence du bitcoin, je ne pensais pas que les investisseurs intelligents seraient assez stupides pour en acheter. J’avais tort. »

Que voilà des propos parfaits pour que les goldbugs se voient relégués au rang de mème…

Le bitcoin en passe de vampiriser l’or ?

C’est la question à 21 millions de bitcoins.

Certains medias, à l’instar de Morning Brew, ont déjà tranché. Comme on peut le lire sur CryptoActu, « le site aux 2,5 millions d’abonnés a décidé tout bonnement d’éliminer le prix de cotation de l’or, qui se trouve ainsi relégué au rang de vieille relique à jeter aux oubliettes, pour le remplacer par le cours du bitcoin. »

30 mars 2021 : « Le moment est venu. Nous avons enfin ajouté le bitcoin à notre section marchés, en remplacement du cours de l’or. »

Pour d’autres, comme Goldman Sachs, le métal jaune et « l’or numérique » peuvent au contraire coexister.

18 décembre 2020 : « Goldman affirme que la popularité croissante du bitcoin ne met pas l’or en danger : l’or et l’or numérique peuvent coexister : « Selon nous, le bitcoin est le trade de reflation sur le commerce de détail, tandis que l’or est un actif défensif avec une préservation du capital réel à long terme », déclare Goldman. »

Mais une « coexistence » ne se déroule pas forcément de manière pacifique. Ainsi, JPMorgan entrevoyait en décembre 2020 un « changement majeur sur l’or et les cryptos », rapporte Bloomberg. L’or pourrait souffrir dans les années à venir car « L’adoption du bitcoin par les investisseurs institutionnels ne fait que commencer, alors que pour l’or, l’adoption par les investisseurs institutionnels est très avancée », écrivent les stratégistes de JPMorgan. Selon leurs calculs, le bitcoin ne représentait alors que 0,18% des actifs sous gestion dans les family offices, contre 3,3% pour les ETF or.

A en croire les chiffres de Coinmetrics, la capitalisation du bitcoin se montait à environ 8% de celle de l’or au 18 mai 2021.

C’est au cours des trois derniers mois de 2020 que l’inquiétude a commencé à grandir dans les rangs des gold bulls, alors que les fonds détenus sur les ETF aurifères dégonflaient de plus de 7 Mds$ et que le Grayscale Bitcoin Trust – un véhicule très prisé des zinzins -, engrangeait 2 Mds$.

Flux agrégés vers le Bitcoin Trust et les ETF or (janvier 2019 – janvier 2021)

Au mois de mars 2021, Jerome Powell déclarait que le dollar n’avait pas à s’inquiéter de l’ascension du bitcoin. L’or en revanche…

Alors, l’or et le bitcoin : amis, ou ennemis ?

Le point de vue d’Incrementum

Demelza Kelso Hays et Mark J. Valek (KH&V) ont apporté une réponse à cette question dans la 3ème édition du Crypto Research Report d’Incrementum publiée en juin 2018. 

Comme l’or en son temps, « les cryptos ont le potentiel pour faire émerger un ordre monétaire concurrent » à celui des Etats, estiment les auteurs de ce rapport. Bitcoin a bien sûr de nombreux défis à relever pour que cela soit possible, mais « Il y a une raison clé pour laquelle le bitcoin pourrait gagner du terrain sur l’or en ce qui concerne leurs capitalisations boursières respectives. C’est le fait que nos vies deviennent de plus en plus numériques », expliquent-ils. Cette mutation touche l’ensemble de la population mondiale, toutes générations confondues. La montée (très progressive) en puissance des Millenials, cette génération débarquée dans la vie active alors que toutes les classes d’actifs étaient bullaires, et après eux de la Génération Z, renforce cette tendance. Ces deux générations ont enfin la possibilité de prendre des positions avant que ne le fassent leurs aînés.

Mais pour KH&V, « L’avenir ne sera pas nécessairement une lutte acharnée pour la suprématie en tant qu’ultime actif de réserve indépendant. Or et bitcoin ne peuvent pas se contenter de coexister, ils peuvent être combinés pour obtenir le meilleur des deux mondes. » En somme, le bitcoin et les cryptoactifs en général ne menacent pas l’or : ils lui sont complémentaires. De nombreuses initiatives, comme la VeraOne, tentent justement d’allier le meilleur des deux mondes en proposant des cryptoactifs ayant pour sous-jacent le métal jaune. Et les auteurs du rapport de citer Peter Grosskopf, CEO de Sprott Inc. : « L’or a toujours été critiqué comme étant un produit inefficace, un produit paresseux, un produit qu’il est difficile d’utiliser pour faire des transactions… C’est presque comme si la blockchain avait été inventée pour l’or. Le mariage des deux, je pense que ça va être incroyablement puissant. »

Amis plutôt qu’ennemis, tel me semble être le destin de l’or et du bitcoin.

Vous n’en n’êtes pas convaincu ? Alors je vous invite à vous pencher sur le comportement de ces deux classes d’actifs entre elles et vis-à-vis des autres.

Si vous ignorez tout de ce sujet, rassurez-vous, je vous retrouverai la semaine prochaine pour tout vous expliquer !

A lundi ! 

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Nicolas Perrin
Diplômé de l’IEP de Strasbourg, du Collège d’Europe et titulaire d’un Master 2 en Gestion de Patrimoine, Nicolas Perrin a débuté sa carrière en tant que conseiller en gestion de patrimoine. Auteur de l’ouvrage de référence "Investir sur le Marché de l’Or : Comprendre pour Agir", il est désormais rédacteur indépendant. Il s’intéresse au libéralisme, à l’économie et aux marchés financiers, en particulier aux métaux précieux et aux crypto-actifs, sans oublier la gestion de patrimoine. Twitter : @Nikookaburra

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