Certains estiment que les récents « cadeaux » accordés par François Hollande à telle ou telle corporation ne sont que le juste retour de la politique fiscale particulièrement sévère qu’il mena au début de son quinquennat. D’autres, parmi lesquels on trouve la Cour des Comptes, reprochent au contraire au chef de l’État d’avoir la main de plus en plus lourde à mesure que l’échéance présidentielle de 2017 se précise.
Il n’aura échappé à personne que, depuis un peu moins d’un an, dès qu’une contestation se fait jour en France, François Hollande et Manuel Valls sortent leur carnet de chèques (enfin, plutôt celui de la maison France) pour écourter les négociations avec les représentants syndicaux qui semblent avoir une idée très précise du coût de leurs revendications. On pourrait croire que le gouvernement a finalement trouvé là le moyen d’éteindre tout début d’incendie social grâce aux courants d’air générés par tous ces millions tombant du ciel, mais l’ennui, c’est que cela aurait plutôt tendance à souffler sur les braises d’un mécontentement plus profond et plus étendu que ces quelques caprices corporatistes dûment dédommagés. Car non seulement les Français commencent à sérieusement grincer des dents en voyant le fruit de leurs impôts, toujours plus élevés, partir à tous les vents pour soigner des causes plus idéologiques que socialement utiles, mais même les plus hautes instances de contrôle de l’État sont elles aussi de plus en plus critiques envers cette politique d’achat de la paix sociale.
Incapacité à maîtriser les dépenses publiques
Ainsi, la Cour des comptes (qui n’en est pas à son premier rappel à l’ordre), vient de tancer une nouvelle fois le gouvernement pour son incapacité à maîtriser les dépenses publiques, notamment en raison de ses incontrôlables largesses à l’égard des corps représentatifs. Dans son rapport annuel sur les finances publiques, rendu public le 29 juin 2016, elle déplore une explosion probable des dépenses publiques de plus de 6 milliards d’euros cette année. Mis en cause, les (trop !) nombreux cadeaux accordés depuis le mois de janvier :
- aux PME (1,6 milliard d’euros pour un plan totalement inutile prévoyant au final une aumône de 167€ par mois qui n’aidera vraisemblablement aucune entreprise),
- au BTP (150 millions d’euros pour l’entretien du réseau routier… pourtant déjà budgété en 2015),
- aux agriculteurs (825 millions qui iront principalement dans la poche des plus gros exploitants en laissant crever les petits paysans comme c’était le cas avant),
- aux fonctionnaires (2,4 milliards d’euros par an au titre de la hausse des salaires),
- aux cancres (400 à 500 millions d’euros pour payer les lycéens décrocheurs afin qu’ils acceptent de retourner à l’école),
- aux instits (265 millions d’euros par an d’augmentation alors que la réforme des rythmes scolaires a déjà coûté plus d’un milliard d’euros sans vraiment convaincre grand monde jusqu’ici),
- aux cheminots casseurs (100 millions d’euros supplémentaires, qui deviendront rapidement 500 millions d’ici 2 ou 3 ans, après une grève qui aura coûté plus de 300 millions d’euros aux contribuables)
- etc., etc., etc., sachant que nous n’en sommes encore qu’à la moitié de l’année…
Une générosité clientéliste sans autre projet
Bref, notre généreux président a visiblement décidé de pratiquer la politique de la terre brulée avant de remettre son mandat en jeu au printemps prochain, un peu comme s’il savait déjà que les conséquences de ses derniers choix débridés retomberont sur d’autres que lui. Calcul un poil mesquin, mais qui n’en est pas moins impopulaire en dépit de ses relents populistes. Car, en dehors des quelques représentants syndicaux qui se sont frotté les mains, la majeure partie de la population voit d’un assez mauvais œil cette répartition pour le moins inéquitable des largesses publiques alors que des pans entiers de l’économie sont réellement sinistrés. Du reste, même lorsque les « cadeaux » semblent aller vers ceux qui en auraient besoin (agriculteurs, jeunes en difficultés, …), ce ne sont finalement que des mesurettes sans conséquences, si ce n’est celle d’accroître encore les déséquilibres au profit de quelques opportunistes.
De son côté, la Cour des comptes dénonce également une totale absence de stratégie concernant les dépenses prévues (autre qu’une stratégie électoraliste, évidemment) et les mesures structurelles annoncées par le gouvernement ne permettront aucune économie à terme. Ainsi, « la hausse programmée des dépenses militaires, les mesures annoncées concernant l’emploi, celles en faveur des jeunes, la modération de l’effort demandé aux communes et intercommunalités, la hausse du point de la fonction publique et les revalorisations annoncées des carrières de certains fonctionnaires vont pousser les dépenses à la hausse, à hauteur d’environ 0,3 point de PIB en 2017 » sans qu’à aucun moment, on ne sente poindre la moindre contrepartie ou compensation à l’horizon.
Des prévisions de croissance exagérément optimistes
Bien évidemment, en prévision de ces critiques, le gouvernement avait déjà communiqué sur une croissance potentielle des plus optimistes, justifiant la capacité de l’État à s’engager durablement sur des dépenses lourdes et pérennes. Mais là encore, la Cour des comptes s’étonne du décalage particulièrement important entre les prédictions gouvernementales et la réalité économique telles qu’elle est perçue par la plupart des organisations internationales, y compris les plus optimistes :
- prévision OCDE (juin 2016) : 1,2% de croissance
- prévision FMI (avril 2016) : 0,9% de croissance
- prévision Commission européenne : entre 0,95 et 1,0 % de croissance
- prévision du gouvernement : … 1,5% de croissance !
Notons que jusqu’en 2015, les prévisions du gouvernement étaient au contraire conformes aux prévisions des organisations internationales (OCDE, FMI, etc.)
Par conséquent, non seulement nous pouvons craindre une augmentation de la fiscalité à partir de 2017 afin d’éponger toutes ces largesses inconsidérées et impossibles à assumer dans l’état actuel des finances publiques, mais attendons-nous à de nouvelles surprises d’ici les élections de mai 2017, ce qui laisse encore 9 bons mois au gouvernement pour creuser toujours davantage le trou qu’il laissera ensuite à d’autres le soin de reboucher… avec l’argent du contribuable, évidemment.