Alors que le métal jaune se situe pour l’instant à des niveaux parfaitement corrects, sans être extraordinairement élevés pour autant (surtout si on compare avec son plus haut de décembre 2011, à plus de 1920 dollars l’once), de plus en plus d’experts s’accordent sur le fait que la période actuelle ne saurait être qu’une phase d’attente du marché avant une brusque explosion des cours de l’or.
Passons rapidement sur l’hypothèse évoquée par certains analystes selon lesquels l’or pourrait au contraire chuter aux alentours de 600 dollars l’once. D’abord parce qu’une telle éventualité semble peu probable au regard des coûts de production de plus en plus élevés liés à la raréfaction et à l’appauvrissement des gisements. Mais aussi et surtout parce que cette « prévision » semble méconnaître la façon dont les cours de l’or s’apprécient face aux devises, et d’une manière générale face à l’économie dans son ensemble.
Une baisse majeure très improbable
Quand l’économie traditionnelle va bien, que les monnaies sont fortes et que les perspectives sont bonnes, alors l’or, en sa qualité de valeur-refuge, n’enregistre que peu de demande (ce qui entraîne une baisse des cours). En revanche, lorsque un ou plusieurs indicateurs macro-économiques sont dans le rouge, le métal jaune grimpe plus ou moins vite selon la gravité de la situation. Aujourd’hui, TOUS les indicateurs sont au rouge vif cramoisi clignotant, avec alarme sonore en prime, et les perspectives d’avenir s’annoncent encore plus sombres. Et ce n’est que parce que les banquiers manipulent (de manière assez malhonnête, il faut le dire) les cours de l’or en « fabriquant » de l’or-papier que la valeur du métal reste contenue très en-dessous du niveau auquel elle devrait se situer normalement.
Ainsi, ceux qui parient sur la baisse de l’or sont, soit complices des banquiers tout en étant assez naïfs pour croire que le château de cartes va tenir éternellement à mesure que le vent de l’instabilité des marchés forcira (et on n’est déjà pas loin de la tempête…), soit suffisamment ignorants en la matière pour pouvoir raconter n’importe quoi sans rougir.
Une hausse des cours de l’or inévitable
Je ne vais pas ici entrer dans l’analyse technique des marchés à grands coups de graphes et de chandeliers. Je ne vais pas non plus essayer de décrypter les signaux politico-économiques à l’échelle de la planète pour tenter de deviner l’avenir. Non, je vais juste rappeler quelques faits simples, évidents, connus de tous, et en tirer ce qui me semble une conclusion logique.
1. La Pénurie
Tout d’abord, ce n’est un secret pour personne, et même s’il est difficile de se mettre d’accord sur les chiffres exacts, nul ne peut nier que les gisements d’or se font de plus en plus rares, de plus en plus profonds, de plus en plus difficiles à exploiter, tout en étant… de moins en moins riches en minerais. Conséquence inévitable, l’or déjà rare va le devenir de plus en plus. Un argument indéniable en faveur de la montée des cours à moyen ou long terme.
À titre d’illustration, l’expert James Rickards relate une anecdote survenue lors d’une visite chez un fondeur suisse en avril dernier. Là, son contact lui explique que la raffinerie expédie plus de 500 tonnes d’or par an vers la Chine, mais que ce rythme devient de plus en plus compliqué à tenir. Il donne alors comme preuve la date de fabrication des derniers lingots expédiés. Dans cette fonderie, la règle veut en effet que les dernières barres d’or fondues soient celles qui partent en premier, ce qui permet d’assurer la rotation rapide des derniers minerais extraits tout en ménageant une réserve en cas de pénurie provisoire. En ce moment, la fonderie en est réduite à expédier des barres fondues… dans les années 1980 ! Ce qui signifie que, non seulement la demande est plus haute que jamais mais qu’en outre les stocks d’or disponibles sont au plus bas, obligeant les fondeurs à puiser dans leurs réserves pour livrer leurs clients.
2. Taux négatifs
Depuis quelques mois, un an peut-être, la finance mondiale a décidé de marcher sur la tête. Désormais, les taux d’intérêts des banques centrales sont négatifs, ce qui signifie qu’on a dépassé le stade de l’argent pas cher, et même de l’argent gratuit, puisqu’on est maintenant entrés dans l’ère de l’argent qui s’auto-détruit. Tout le monde est conscient que cette fuite en avant constitue la pire des manœuvres désespérées qu’on pouvait envisager, et qu’en plus elle ne fonctionne pas comme on le souhaitait. Tout le monde sait aussi que le peu de confiance qu’on pouvait encore accorder à la finance et aux monnaies-dette a dorénavant complètement disparu et que de plus en plus de gens se tournent vers des solutions de repli hors système bancaire et autres valeurs refuge (comme l’or, mais aussi l’immobilier par exemple) en espérant tenir le temps que passe l’orage (qui risque plus de ressembler à un déluge biblique, soit dit en passant).
Toute le monde, enfin, sait que lorsqu’il faudra revenir en territoire positif, de nombreuses banques mais aussi de nombreux États se retrouveront automatiquement en situation de faillite… qu’on s’efforcera bien sûr d’éviter en déversant des quantités astronomiques de liquidités nouvelles dans lesquelles plus grand monde n’aura confiance. À ce titre, il y a de grandes chance que la valeur des richesses tangibles grimpe en flèche. Un point de plus pour l’or.
3. Indices surcotés
Les places boursières mondiales se félicitent actuellement de leur bonne tenue en dépit des évènements majeurs (et souvent désagréables) qui agitent l’économie en ce moment. Ainsi, terrorisme ou pas, Trump ou Clinton, guerre ou paix, le Dow Jones flirte actuellement avec ses plus hauts, tutoyant parfois les 18400 points alors qu’il n’était même pas à 14000 à la veille des subprimes en 2008. En Europe, même son de cloche, à croire que le Brexit n’a eu strictement aucune incidence.
Et pourquoi cette apparente bonne santé ? Grâce aux valeurs bancaires qui claquent des records de performance boursière insolente. Sauf que si les banques sont aussi florissantes (en apparence, toujours), c’est parce qu’elles ont été abreuvées, inondées, submergées de devises fabriquées à une cadence infernale par le jeu des Quantitative Easing. En clair, de la monnaie de singe qui vient renforcer l’intérêt de se positionner urgemment sur des valeurs tangibles avant que tout parte à vau-l’eau.
D’ailleurs, quand on y regarde de plus près, certains signes ne trompent pas. Ainsi, dès l’annonce du Brexit, le cours de l’or a bondi de 15 ou 16 % alors que ce genre d’évènement (en temps normal) n’était pas de nature à provoquer une telle réaction. De la même façon, en France, on a beau se dire qu’on a évité au CAC40 de sombrer en-deça des 3900 points (comme on pouvait le craindre au printemps dernier), les efforts pour redynamiser artificiellement l’indice parisien ne parviennent pas à faire illusion au-delà des 4500 points, comme si ce seuil constituait la limite à la surcote : régulièrement approchée, parfois effleurée, jamais dépassée, avec parfois des corrections brutales et retour aux alentours de 4200 points en quelques jours…
Qui dit surcote dit bulle, et qui dit bulle dit explosion à un moment ou à un autre. Les plus prudents ont depuis longtemps retiré leurs billes des marchés financiers traditionnels et même certains cabinets d’investissement recommandent désormais l’or et les métaux précieux pour « diversifier et protéger son capital ». Du jamais vu depuis plus de 20 ans !
4. Dollar en berne
Encore un fait avéré et établi : l’or monte mécaniquement quand le dollar baisse (et réciproquement), quel que soit le rapport entre l’offre et la demande d’or physique qui, tant qu’on ne craignait pas de pénurie, n’ont jamais vraiment influé sur les cours. Aujourd’hui, l’or se situe au niveau de ce qu’il valait en dollars dans les années 80-90, alors que le dollar a perdu la moitié de sa valeur relative depuis cette époque.
La situation actuelle est une « anomalie »
Dans un tel contexte, n’importe quelle matière première verrait ses cours exploser sans commune mesure. Étonnamment, l’or reste on ne peut plus calme, en violation des règles économiques les plus élémentaires.
En réalité, ce qui ressemble à une « anomalie » n’est rien d’autre qu’une vaste fumisterie à l’échelle planétaire destinée à sauver les marchés financiers classiques. Parmi les manœuvres irrégulières mises en place par les banquiers centraux, on trouve des interventions massives sur le marché des produits dérivés qu’ils inondent de « contrats-or » censés être garantis par de vrais lingots. On sait aujourd’hui que cet or virtuel excède de beaucoup l’or réellement disponible dans les coffres, ce qui a pour effet de maintenir les cours du métal artificiellement bas. On sait aussi que cette stratégie montre des signes de fatigue et que la défiance envers les banques nuit de plus en plus à la crédibilité de leurs contrats-or.
Au final, à l’occasion d’une prochaine crise majeure, tous ces titres prétendument adossés à de l’or — mais dont on soupçonne que 80 à 90% sont construits sur du vent — pourraient bien révéler brusquement leur vacuité, et disparaître en même temps que les institutions qui les ont créées. Ainsi sauterait le dernier verrou libérant l’envolée des cours de l’or… physique !