Ils s’étaient engagés à mettre un frein à leur avidité. Mais, à peine sauvés de la faillite à coups de milliards de fonds publics, les banquiers ont repris leurs bonnes vieilles habitudes : accumuler des profits à tout prix.
Souvenez-vous, c’était à Londres début avril. Les maîtres du monde, réunis au G20, promettaient, croix de bois, croix de fer, de mettre fin aux scandales de la finance mondialisée, aux excès de l’argent fou, aux dérives du « toujours plus » (de fric). Enfin, on allait encadrer les rémunérations des banquiers, coupables de pousser «à une prise de risques excessifs». Enfin, on allait contrôler les bonus déments des traders. Enfin, on allait mettre un terme à l’avidité et à la cupidité de ces financiers gavés de primes extravagantes, de stock-options indécentes et de parachutes dorés sur tranche. Pure illusion ! A peine sauvés de la faillite à coups de milliards de fonds publics, banquiers et traders ne pensent qu’à une chose : s’en remettre plein les poches, tout de suite, maintenant, sans même attendre une hypothétique sortie de crise. Surtout, que tout recommence comme avant, que la fête continue !
Depuis quelques semaines, les exemples se multiplient des deux côtés de l’Atlantique. Dernier en date : la banque d’affaires américaine Goldman Sachs, qui a pourtant échappé au pire grâce aux 10 milliards de dollars déboursés par le contribuable. Ses dirigeants de l’époque avaient d’ailleurs profité de l’aubaine puisque, selon le Financial Times, ils auraient vendu en pleine tourmente quelque 700 millions de dollars d’actions qu’ils détenaient. Quelques mois plus tard, Goldman Sachs a recouvré la santé. Comment ? Essentiellement en prêtant très cher à ses clients de l’argent qu’elle emprunte à très bas coût auprès de la
Réserve fédérale, c’est-à-dire l’Etat. La banque a même annoncé vouloir s’acquitter au plus tôt de ses dettes envers le gouvernement. Bonne nouvelle, se dit-on. Erreur. Cet empressement à rembourser n’abuse que les naïfs. Il s’agit, pour le patron de Goldman Sachs, Lloyd Blankfein, de s’affranchir des contraintes liées à cette aide publique, à commencer par le plafonnement des rémunérations.
Extrait d’un article écrit par EMMANUEL LÉVY, HERVÉ NATHAN ET MARC PERELMAN pour le magazine MARIANNE du 18 au 24 juillet 2009